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Jean Piat
Extrait de La Télé sans écran

mots-clés: Théâtre, Foi, Art, Cinéma 

   Radio, CD… vais-je rester sans écran encore une fois ? Qui me donnera la touche télé, à laquelle cette chronique est destinée dans le principe ?… Je promenais ce petit souci à travers telles émissions possibles, lorsqu’un joli hasard me mit sur la bonne fréquence : un entretien avec Jean Piat. Le questionneur, raide et fort maladroit, avait écrit toutes ses demandes avant de commencer, et ne se laissait jamais conduire par les heureuses réponses pour poser la question suivante. Autant dire qu’il n’écoutait pas. Rien de grave : le naturel de l’acteur, et plus encore sa bonne grâce, (son charme, dirait Hélène) emportaient tout…

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   Il est un des comédiens que nous préférons, par la présence physique sans doute, mais plus encore, et plus solidement, par l’aisance et l’exactitude d’un parfait serviteur du texte. Rompu aux disciplines de l’articulation, et à la science de la meilleure langue, il fait briller un répertoire – Molière, Marivaux, Giraudoux… – qui, sans doute, n’est qu’une part de notre trésor, mais dont la disparition signerait le désastre de la France. On me dira que le monde ayant vécu avant cette France-là, il pourrait encore vivre après. Assurément. Permettez toutefois que j’en soupire… Et si vous trouvez que j’anticipe, ou que j’exagère, puisque nous avons toujours des comédiens sachant dire, je soutiendrai que j’en connais peu capables comme lui de s’effacer devant le texte au point qu’on ne voie plus l’acteur, alors même qu’il brille d’un éclat solaire ! Pourrait-on l’affirmer de tel excellent diseur, Lucchini par exemple, dont l’ego ne laisse guère le pas à ses personnages ? (Au vrai, ce Lucchini ne brille jamais autant que lorsqu’il prend un rôle où le moi est tout : son docteur Knock est un chef-d’œuvre, aussi inquiétant que celui de Jouvet…)

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   Je reviens à Jean Piat, pour vous recommander encore une fois les « Fausses confidences » de Marivaux où il était deux fois serviteur, par son personnage dans la comédie, par sa mise en scène pour la télévision. Et son « Chantecler », dans l’admirable version de Jean-Christophe Averty… Il faut réclamer à quelque chaîne publique le droit de revoir ces émissions au moins tous les ans ! Voilà qui ne coûterait guère, et rapporterait infiniment, si l’on calcule le ‘rapport’ comme il se doit…

 

   Je retourne à mon entretien : on demande à l’acteur de parler de lui, ce ‘lui’ qui reste sur les bras quand on a replacé le costume dans la loge. Occasion de confesser des faiblesses : « Vous comprenez, quand on joue en matinée tous les dimanches, on s’habitue à manquer la messe, je ne dis pas qu’on a raison, je dis ce qui s’est passé… Plus grave : telle personne, que l’on a perdue, l’a-t-on aimée comme on le devait, comme on le souhaitait ? » De regret en remords, la confession, pour rester pudique, n’en était pas moins émouvante. Enfin une bonne question : « Et la sainte Vierge ? » Jean Piat : « Oh ! c’est ma mère ! Jamais un soir sans le ‘Je vous salue’, et plusieurs fois le jour. » (…) Puis une question sotte : « N’avez-vous jamais des doutes ? » – « La foi ? Eh bien, c’est la foi, ce n’est pas la vision. Quand on perd un être très proche, on ne le voit plus, alors on est dans l’obscur ; mais cela n’abolit rien ; c’est notre vie en ce monde. Il faut aller quand même, prier encore… »

 

   C’était au « Jour du Seigneur », le dimanche 16 juillet, à midi moins sept (sans doute la reprise d’une émission.) Merci, « Jour du Seigneur ». Merci, KTO. Sur ces télés diversement catholiques, il y aurait beaucoup à dire, et pas seulement du bien. Cependant, dans leurs imperfections plus ou moins basiques, cette chaîne existe, et cette émission. Merci à l’une d’aider l’autre, si elle le peut. Nous n’avons pas besoin que les chrétiens pensent sur tout sujet la même chose. Nous avons besoin qu’ils existent, visibles, audibles. Puisqu’ils ont les paroles de la vie éternelle. Puisqu’ils sont la lumière d’un monde aveuglé…

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