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"Le Ruban bleu de la Daurade"

Témoignage de Marie-Thérèse Gardeil-Krieg
sœur de Pierre

   En 1931 à Astaffort Yvonne (ma mère) a eu déjà deux enfants de 8 et 6 ans (Jacques et André), le médecin lui a dit qu’elle ne devait absolument pas tomber enceinte une nouvelle fois : elle risquait et sa vie et celle de son enfant. Et puis voilà qu’elle est de nouveau enceinte… Et le pire en effet s’annonce, elle va mal, de quelle maladie s’agit-il ? Elle ne me l’a pas dit, mais elle me racontait que son urine était si épaisse que, si on l’avait mise dans un verre avec un crayon dedans, le crayon aurait tenu debout tout seul. Or vivait à Astaffort une femme qui lui conseilla de se confier à la Sainte Vierge en s’adressant tout particulièrement à Notre-Dame de la Daurade à Toulouse que l’on invoquait pour des grossesses difficiles ; Yvonne s’empressa d’écrire au curé de cette église qui lui répondit et lui envoya un ruban-ceinture et lui dit de le porter sur elle en priant pour une bonne grossesse, une bonne délivrance et surtout que cet enfant soit consacré au service du Seigneur. La grossesse se passa sans encombre (je crois…) et le jour de la délivrance arriva, c’était un dimanche, le docteur était absent et on alla chercher la sage-femme à la messe… Mais, avant même qu’un des deux n’arrive, il n’y eut que trois contractions et l’enfant sortit et son père improvisé sage-femme ne savait comment faire pour couper le cordon ombilical. Il paraît qu’il se servit de deux morceaux de rubans pour bigoudis pour lier les deux parties du cordon avant de le couper…… Et que maman délivrée riait de le voir si malhabile et si stressé (dirait-on aujourd’hui), à tel point que quand le médecin arriva enfin, l’enfant criait bien fort et il dit à mon père : « Je vous félicite, vous avez un beau garçon. » « Ah, répondit le père, je ne l’avais pas encore vu !!! » C’était le 11 mars 1932, et c’était Pierre qui venait de naître…

 

   « Il poussa comme un champignon », disait maman et jamais il ne fut souci pour ses parents quand il alla à l’école, un de ses petits camarades disait étonné : « Pierre, il sait plus que la maîtresse » (ça vous étonne ?? !!) Le reste, vous le connaissez, après le bac passé si jeune, il ne savait quelle voie choisir car toutes les matières lui étaient également faciles, les sciences, les lettres…… Il finit à Toulouse le plus jeune licencié de philo de sa promotion… (maman croyait qu’il se ferait prêtre, et quelle ne fut pas sa perplexité sans doute quand elle vit qu’il se mariait… Ne l’avait-elle pas consacré au service du Seigneur ?)……… Le reste, vous le savez aussi.

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   Puis arriva le projet de loi Savary en 1984. Pierre est dans tous ses états : « Jamais Mitterrand ne me forcera à dire ce qu’il voudrait que je dise, je démissionne sur le champ, j’irai balayer les rues…… Fini le métier de professeur… ». C’est alors que, inspirée par le Saint-Esprit, je pense, je lui écris une lettre plus ou moins dans ces termes :

   « Mais enfin, Pierre, cesse de te tourmenter, ceci (l’école, ta carrière) tout ça, ce n’est pas ton œuvre, tu as prêté tes bras, ton cœur, toutes tes forces, ton intelligence, mais ce n’est pas toi qui l’as en mains, rappelle-toi ta naissance merveilleuse, comme tu as été sauvé de la mort et maman aussi pendant cette grossesse, rappelle-toi que tu as été consacré au service du Seigneur dès le sein de ta mère. Tu as servi jusqu’à ce jour mais c’est Un Autre qui a les plans en mains… » Très peu de temps après, je viens en France et je rencontre Pierre à Astaffort qui me dit, bouleversé : « Ce que tu m’as dit dans ta lettre, je ne le savais pas ! Maman ne m’en a jamais rien dit. » et il ajoute : « Autrefois on ne parlait pas d’accouchement ni de grossesse avec les hommes… Mais je crois que le Bon Dieu a attendu ce moment de tourmente dans ma vie pour me révéler cela au moment où j’en avais le plus besoin. »

   Puis-je aussi ajouter à ce témoignage toute ma gratitude à la Mère de Dieu qui en sauvant Pierre et maman du désastre en 1931 a aussi permis à François en 1939 et à moi Marie-Thérèse en 1942 de venir au monde.

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Marie-Thérèse Krieg-Gardeil

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