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Pierre Gardeil et la musique

Parmi ceux qui liront ces lignes, beaucoup savent déjà ce que Pierre Gardeil fit pour la musique, à travers les Nuits Musicales en Armagnac et le chœur du lycée Saint-Jean. Certains même auront lu ses Promenades Lyriques (Cosi fan tutte, Orfeo, Don Giovanni, Didon et Énée…) présentes sur ce site. Nous voudrions parler, aujourd’hui, de la relation personnelle de Pierre avec cet art sans mots, mais capable mieux qu’eux, il en fut convaincu toujours plus, d’atteindre l’essentiel.

Vous trouverez aussi les témoignages de Jean-François Gardeil, Geneviève Cockenpot, Jérôme Gose et Michèle Olivier. Geneviève reçut de Pierre la responsabilité du chœur lorsque Roland Fornerod connut des problèmes de santé ; elle en dirigea les répétitions et certains concerts jusqu’à une période récente. Jérôme  est professeur agrégé de musique au Lycée Palissy d'Agen et dirigea également pendant plusieurs années le choeur de Saint-Jean. Quant à Michèle, elle nous livre le ressenti sur Pierre des chanteurs valaisans, qui, avec leur chef Marius Pasquier, participèrent à de nombreux concerts du choeur lectourois. 

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Naissance d'un site-archive: il sera désormais possible de consulter et de télécharger les enregistrements audio  et vidéo, ainsi que les photos de tous les concerts depuis 1973. La mise en ligne aura lieu  très prochainement, sur le site  www.ensemble-saintjoseph.com .

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Hommage filial - Jean-François Gardeil

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Pierre Gardeil parlait rarement de sa rencontre avec la musique; ou bien il y mettait une condescendance souriante et gênée, comme à l’évocation d’une erreur de jeunesse, tant il estimait incomparablement les découvertes qu’il fit plus tard dans ce domaine, et qui furent si fécondes sur sa vie d’homme, de pédagogue et d’écrivain.
Evoquons tout de même ces commencements. 
Dans sa famille comme dans bien d’autres en province, on connaissait la musique d’abord par la radio, qui faisait une large place aux opéras français, et par les chants de la paroisse. Son père Jean, grand amateur de Faust et belle voix de basse, emplissait sa biscuiterie des airs de Méphisto et les rues d’Astaffort de cantiques, seul homme à y chanter crânement pendant les processions, à la grande confusion de sa fille. 
Pierre,  franc ténor, chanta à dix-huit ans le Minuit, Chrétien  à l’église. « - Qu’en avait dit ton père, à l’époque ? – A l’époque, on ne commentait pas. » La muse, du moins, entrait dans sa vie.
Le chant, donc, déjà. Les instruments ? Chez mes grands-parents, c’était seulement le mystère de ce piano faux et muet dans une pièce aux volets toujours fermés, à l’odeur d’encaustique, où un bouquet de lilas s’éternisait sur le napperon ; il ne fallait pas y entrer.
Chez nous à Lectoure, maman fredonnait des phrases d’opérettes apprises encore par la radio, mon père des bribes de chansons de Trénet, ou des mélismes si heureux, si suaves que je fus bien surpris de les retrouver plus tard dans le Libera me de la messe des morts. Pour Pierre, avec la musique, c’était encore une liaison insouciante.
Un jour de l’année 1964, on lui demanda de présenter le concert d’un ensemble vocal naissant, qui donnait à Vic-Fezensac le Requiem de Fauré. Un carton d’invitation accompagnait la demande, évoquant aussi un « lunch », vocable étrange et prometteur, pour ma sœur et moi, de festivités inouïes...
Pierre ne fut pas long à entrer dans les rangs de l’Ensemble vocal de l’Armagnac. Il revenait des répétitions enthousiaste, répétant à l’envi la partie de ténor qui, détachée de l’harmonie et peu mélodique par elle-même, en gagnait un étrange prestige. Ce devait être ça, la musique classique…

Commença une période bénie dont Pierre profita à plein. Dynamique et inventif, André Clarac entraînait son groupe dans des concerts mêlant répertoire sacré et profane, Janequin, Berlioz et Poulenc, pour l’émerveillement de ses apprentis et du public. Ce chef infatigable imagina bientôt de créer un festival à l’abbaye de Flaran, le département l’ayant invité à animer le site. Mon père et deux autres ténors décidés, Jean Bréna et Claude Ballario, l’épaulèrent, commençant un bail de quarante étés à sillonner le Gers, remuer des chaises, coller des affiches, secouer curés et maires, mobiliser presse et radios, pleurer les subventions, gaver les artistes de canard et d’Armagnac… pour que sonnent les grands oratorios de Bach et Haendel dans des cathédrales combles. La force d’entraînement de Pierre se déploya pleinement dans les stages choraux que le festival organisa bientôt. Autour de la table familiale, on ne parla bientôt plus que de musique et d’organisation… Là, c’était clair : Simone avait une rivale.
Directeur de Saint-Jean, il voulut bien sûr y fonder un chœur. La providence lui envoya un ancien chanteur venu du Valais, en Suisse. Oui, la providence, car Roland Fornerod,  artiste enclin à la mélancolie, doutant de lui, possédait ce qui importait le plus à mon père, le sens du Beau, le goût de la profondeur, et une haute idée de la mission qu’on lui confiait. Mieux, l’ardente piété qu’il vouait  aux œuvres de génie, jointe au sentiment de son insuffisance, forçait les choristes à mesurer la distance qui les en séparait eux-mêmes. C’est ainsi qu’il éveilla chez nous des vocations nombreuses, mieux peut-être que n’y serait parvenu un technicien sûr de lui et de méthodes apprises. La réussite de Roland Fornerod dut beaucoup aussi aux fréquents entretiens où mon père ranimait son courage abattu, avec une patience, pour qui le connaissait, un peu surnaturelle. Il était devenu le servant de sa muse.  
Au programme du premier concert, Roland proposa l’oratorio Jephte, qui résumait déjà toute l’ambition esthétique et spirituelle que mon père formait pour ce chœur : accessible aux débutants, alliant simplicité, dramatisme et splendeur, riche d’émotion et de sens… cet épisode biblique, où l’Ancien préfigure le Nouveau, n’était pas venu par hasard à l’esprit des oratoriens.
Ceux qui assistaient à ce concert inaugural se souviennent que Pierre et son aînée Geneviève incarnaient Jephte et sa fille – le hasard sait-il faire cela ? - mais ils ignoraient, comme nous tous, que ce grand religieux au premier rang, si vieux et si impressionnant dans sa bure noire, n’était pas un inquisiteur mais l’exquis compositeur Dom Clément Jacob, bénédictin d’En Calcat venu ce soir-là - par hasard croiront encore certains- porter le destin de ce chœur sur les fonts baptismaux.
Ainsi commença une longue série de concerts, qui à ce jour n’est pas close. De l’abbaye de Saint-Maurice en Valais où Roland avait jadis trouvé  soutien, vint bientôt son ami le chanoine Pasquier, chef d’orchestre et de chœur, un ange musicien, un être rare, plus pétri d’esprit que de chair, à peu près sans ego (un chef sans ego… la providence, vous dis-je !) Comme sur les statues romanes, ses yeux semblaient tournés vers l’intérieur. Il apprenait  à beaucoup tout ce que la musique tient du silence et lui rend, leur révéla une dimension d’eux-mêmes qu’ils ignoraient, celle dont le siècle ne leur parlerait peut-être jamais. Pierre dut penser que c’était encore le Ciel qui l’envoyait, lui aussi…
Il avait fort bien chanté le rôle-titre de Jephte, aux interventions violemment contrastées, qui convenaient à son tempérament et à sa voix vaillante. (On peut désormais réentendre ce concert de 1973 et tous ceux qui suivirent, voir le lien indiqué par ailleurs). Il prenait des leçons de chant avec Roland Fornerod mais il y manquait –le croirez-vous ?- de patience, très souvent interrompu avant l’aigu libérateur… car n’ayant plus dix-huit ans, il y allait un peu en force et faisait "craquer les vitesses". (La muse ne lui accordait pas tout ; et puis quoi encore ?) Un jour l’oncle Michel, prenant un aigu pour un cri, entra brusquement dans le salon : « Pierre ! Tu t’es fait mal ? » Devant le succès de ce mot dans la famille, Papa ne voulut jamais admettre que son beau-frère n’y avait pas mis de malice.


A l’époque, beaucoup migraient, et il fut de la caravane, vers la musique baroque où il trouva des joies aussi élevées que chez Racine, Pascal et Bossuet, ses familiers. Monteverdi, Charpentier et Lully les rejoignirent dans son Panthéon –qu’on n’ose dire personnel, tant Pierre partageait aussitôt ses découvertes avec les élèves rassemblés devant la chaîne Hi-Fi. Mais cette musique avait la vertu supérieure, miraculeuse, d’encorder et de hisser vers les cimes ceux qui, en littérature et en philosophie, piétinaient un peu sur le camp de base. Ses collègues partageant cette conviction, ils s’employaient fort, et ce furent de très belles années ; le film Mozart en Gascogne, présent sur ce site, en laisse échapper maint effluve. Béatrice Uria-Monzon, née de ce chœur, montait au firmament de l’art lyrique. D’autres aussi faisaient carrière, dont un fils, un neveu, bientôt des petits-fils ; et de tant d’autres encore, solistes et choristes, le chant embaumerait la vie. La muse couronnait Pierre, répandait l’huile sur sa barbe.


Chez lui l’admiration n’allait pas sans une cordiale dépréciation du reste. Le XVII° siècle et ses contours ayant selon lui tout trouvé et tout dit, la suite allait, à l’exception notable de Mozart, glisser vers le mensonge romantique et la religion du sentiment. Vous  comprenez pourquoi l’intellectuel, chez lui, rougissait des émois lyriques reçus au Capitole et dans la Garenne de Nérac, où ses vingt ans avaient applaudi José Luccioni.  Lorsque ses petits-fils évoquaient Werther, Lakmé ou La Bohème, je me souviens de son visage où se disputaient une indulgence attendrie - « Ah ! De quels souvenirs viens-tu… »- et la sévérité mûrie du « Jeune homme, vous ne savez pas ce que vous dites ».
À table, le prof chez lui dominait. Il y était un peu doctoral, puis, s’échauffant, péremptoire et provocateur. Mais dans le vestibule ou l’escalier, à l’acoustique flatteuse, une bouffée lyrique le reprenait, et il tirait Massenet ou Gounod des enfers avec une grâce retrouvée, à laquelle maman répondait.
Quelques souvenirs en bouquet, que ma fratrie m’a aidé à rassembler : premier de cordée dans l’âme, il commença le piano avec mes frères, comme avec moi le grec. Le dimanche matin, au printemps, il mettait le disque du Messie, un peu trop fort pour la maison mais toutes fenêtres ouvertes ; remerciait-il le Créateur ? Et puis La Vie parisienne, pour rendre le sourire à notre mère. On ne lui montrait pas de musique nouvelle, car il voulait la juger tout de suite. Auditeur d’un concert, il tournait vers nous, ostensiblement, un visage douloureux –et impayable- si la justesse était un peu mise à mal. A l’église, certains chants l’accablaient ; il entrait en Purgatoire. (Maman craignait toujours un éclat). A une époque, il voulait montrer Le salon de musique, le film de Satyajit Ray, à tous ses visiteurs. Merveilleux film, pour qui n’est pas pressé…


Pierre et la musique, ce sont aussi les « promenades lyriques », essais parus dans les Saisons de Saint-Jean et que l’on peut retrouver sur ce site. Sous l’éclairage girardien, il y analyse de façon très inspirée les livrets de Cosi fan tutte, de Didon et Enée, parfois seulement un air… la muse l’accompagnait dans ce registre aussi.


Dans les dernières années de sa vie, Pierre accordait à la musique un « degré d’être » supérieur au langage des hommes, toujours menacé de mensonge ou d’erreur. Il voyait en elle l’accès à une région de l’âme « d’où elle procède, et où elle nous attend ». Cette confidence, qui relevait chez lui d’une intuition intime, j’aimerais pour finir l’associer au sens vertigineux qu’offrait pour lui le mot d’Antoine Goléa, extasié par un air de Mozart : « Ce n’est plus de la musique, c’est de la charité toute pure… »

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Pierre Gardeil, une des belles rencontres de ma vie - Geneviève Cockenpot

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Lorsque j'ai rencontré Pierre Gardeil à la rentrée de septembre 1974 il était le directeur du lycée saint-Jean. Il m'impressionnait terriblement ; j'étais alors à peine plus âgée que mes élèves de première et lorsque je descendais l'escalier avec eux, il plaisantait en me disant que j'avais l'air d'une élève, ce qui me faisait rougir instantanément. Quelques jours plus tard je lui demandais quelles activités étaient proposées et il me demanda alors si j'aimais chanter!... Immédiatement il nous entraîna, mon mari et moi, à l'Ensemble Vocal de l'Armagnac et à la chorale du lycée. C'est ainsi que je fis la connaissance de Roland Fornerod. A l'époque les adultes faisaient un petit stage à St-Jean avant la rentrée pour soutenir les élèves au concert d'octobre. Nous avons été ravis de participer à ces belles aventures.

Quand Mr Fornerod a arrêté de s'occuper de la chorale en 1979 nous avons été désemparés, Pierre envisageant même d'arrêter cette activité. Ce sont les professeurs, y compris des non-chanteurs, qui nous ont poussés à continuer. Il faut dire qu'à ce moment-là une bonne équipe de profs chantait ! La première session de chant choral des  N.M.A. ayant  eu lieu  cet été-là, Pierre m'a  confié les rênes du choeur alors que je n'avais fait travailler que des pupitres. Heureusement j'étais pianiste...

Une nouvelle aventure a commencé. Nous nous sommes lancés dans des programmes de plus en plus ambitieux jusqu'au premier Requiem de Mozart en 1989 avec nos amis de Saint-Maurice et l'orchestre des jeunes sous la direction émouvante de Marius Pasquier. L'Ensemble Vocal de Saint-Maurice était déjà venu pour quelques concerts et des liens exceptionnels d'amitié s'étaient immédiatement créés. Pour ce concert du Requiem Marius m'avait encouragée à diriger la 1ère partie. Jamais de la vie je n'aurais imaginé vivre une telle expérience !

Ce choeur est en effet si particulier et si attachant par son caractère intergénérationnel : accessible à tous, jeunes et adultes sont sur le même bateau pour travailler avec acharnement.

Nous avons tous vécu des moments inoubliables. Que de belles et audacieuses expériences musicales avec des oeuvres aussi marquantes que le Requiem de Mozart, Didon et Enée de Purcell, La Création de Haydn, La Passion selon Saint Jean de Bach, David et Jonathas de Charpentier, Orfeo de Monteverdi, le Stabat Mater de Dvorak, le Messie de Haendel, le Magnificat de Bach, les Saisons de Haydn, la Petite Messe Solennelle de Rossini, le Requiem de Fauré, les Airs d'Opéra, les Vêpres Solennelles de Mozart, le Stabat Mater de Jenkins et bien d'autres...

Que de rencontres intéressantes avec les solistes, les chefs et leurs orchestres !

Par-dessus tout : l'émerveillement de très nombreux jeunes lycéens qui découvraient le chant choral et vivaient ainsi leur première expérience de musique d'ensemble : cet art si fédérateur qui permet de vibrer de tant d'émotions dans une communion parfaite.

L'objectif énoncé par Pierre Gardeil " la sainte blessure " a toujours été atteint, je crois et nous sommes nombreux à pouvoir l'en remercier. Je ne sais pas si c'est lui qui a inventé cette expression mais quelle belle définition pédagogique et spirituelle !

J'ai toujours considéré que la musique sacrée était un des plus merveilleux vecteurs de catéchèse et je crois qu'aucun jeune, même inconsciemment, n'est insensible à cela. Quand on donne à ces jeunes l'accès à de grandes oeuvres sacrées par le chant choral, ils ont déjà un pied au paradis. ils s'en rendent souvent compte quelques années plus tard...

Plusieurs élèves ont d'ailleurs fait une belle carrière de solistes ou de choristes professionnels : Jean-François Gardeil, Béatrice Uria-Monzon, Caroline Fèvre, Philippe Estèphe, Emmanuel Gardeil, Pascal Gardeil, Nathalie Minot, Cathy Biar, Pierre-Yves Binard , Clémence Braux ; d'autres dans des ensembles vocaux de haut niveau : Geneviève Gardeil, Benoît Souquère, Sabine Cockenpot, Paul Suffran, Perrine Braux...et bien d'autres encore.

Pendant plus de 20 ans Pierre et moi avons énormément travaillé avec la collaboration toujours accueillante et souriante de Simone, son épouse. Que de petits repas et de tasses de thé dans leur cuisine en toute simplicité ; et bien sûr de multiples apéros ( l'armagnac étant réservé aux ténors en pupitre.....) dans leur salon ou les verres de Fendant avec les Suisses, l'histoire de Babar racontée aux enfants ( et aux grands ) par Pierre avec Billy Eidi au piano. Bref il y avait toujours quelque chose à fêter !

Il y eut aussi beaucoup de voyages en Suisse dont quelques-uns avec les élèves pour chanter en concert ou pour un stage. A peine arrivés nous étions accueillis avec une multitude de " décis " de Fendant et de la viande des Grisons...Je me souviens aussi d'une raclette géante organisée et parfaitement orchestrée par l' Ensemble Vocal : nous étions très nombreux. Une autre fois Marius nous avait tous emmenés dans son pays La Gruyère avec ses magnifiques paysages et ses histoires racontées dans le bus avec l'accent de là-bas. Il nous avait offert un " goûter-dessert" typique  de sa région : meringues, fruits de la forêt et crème de Gruyère : un régal ! Nous avons aussi visité une chocolaterie avec dégustation à volonté.....

On travaillait beaucoup mais qu'est-ce qu'on s'amusait ! C'est un des secrets de la réussite. Pour finir la journée de travail...on dînait au restaurant " le Philosophe " ( ça ne s'invente pas ) avec deux profs de philo : Pierre lui-même et Dominique Pignat.

Une autre anecdote rigolote à Lectoure : les jeunes de l'orchestre suisse ont découvert le Pousse-Rapière à leur premier séjour et avaient bu toute la réserve de Marcel qui tenait à l'époque le café à côté du cinéma. Marcel n'en avait pas tant que cela. Aussi quand il savait que les Suisses venaient pour le concert il faisait le plein et  il a dû faire, je crois, quelques bonnes affaires grâce à eux...

De bons et chaleureux souvenirs entretenus par des amitiés solides il y en a beaucoup dans le coeur de chacun !

Je crois pouvoir dire sans fausse pudeur que toutes ces années m'ont fait grandir dans un domaine que je n'avais pas du tout envisagé. C'est Pierre qui m'a mis le pied à l'étrier, ce qui est sympa pour une cavalière....Nous avons été un peu fous dans nos projets mais je crois que personne ne le regrette...

Pierre a été et reste l'âme de ce choeur. Qu'il en soit remercié !

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Les feux de la musique sacrée - Jérôme Gose

 

C’est en 1984 que j’intègre le lycée Saint-jean en classe de première. Conscient de mon intérêt pour la musique, Pierre Gardeil m’a aussitôt invité à intégrer ce qui était déjà une institution depuis qu’il l’avait créée en 1973 : le chœur de Saint-Jean.

Organiste et pianiste de formation, je découvre l’émotion que procure cette nouvelle pratique, ainsi que les genres majeurs de ce répertoire vocal sacré. Alternativement basse et chef de pupitre, je mesure peu à peu l'apport culturel qui vient enrichir ma modeste formation musicale jusque-là circonscrite dans le domaine instrumental.

Je garde un souvenir ému de ces années de découverte, ponctuées par les nombreuses répétitions, les stages et les concerts sous la houlette de Geneviève Cockenpot, cheffe de chœur qui habitait chaque séance de répétition avec une exaltation stimulante. Illustre choriste, Pierre Gardeil était lui aussi porté par une indéfectible envie d’élever nos jeunes esprits, ayant toujours à cœur de nous donner à entendre les figuralismes indicibles de la musique mis au service du mot par le compositeur. Sa puissante voix de ténor, tout aussi impressionnante qu’inspirante pour nous tous, imprimait tout à la fois sa passion communicative pour la musique sacrée, et sa volonté de la faire connaître.
 

Mon premier contact avec le chant-choral fut celui de la musique française du XVIIe siècle avec David et Jonathas de Marc-Antoine Charpentier donné en 1984. Ce fut une véritable révélation qui me donna définitivement le goût pour cette musique si singulière dont l’esthétique théâtrale pétrie de contrastes et de fastes, m’inspire aujourd’hui encore dans mes choix de répertoire. C'est encore le répertoire français, mais du XIXe siècle cette fois, qui fut donné l'année de ma terminale avec l’émouvant Requiem de Gabriel Fauré.

Désormais étudiant au Conservatoire et à l’université de Musicologie de Toulouse-le-Mirail, je reviendrai chanter le Te Deum de Gilles en 1986. Puis fraîchement diplômé, - et toujours avec le même plaisir -, j’aurai le bonheur de chanter dans les chœurs de La Passion selon St Jean de Bach en 1996, du Messie de Haendel en 2000, ou encore du Gloria de Vivaldi en 2002.

Quelle chance d’avoir vécu cela ! Fréquenter des répertoires ambitieux, exigeants, où se mêlaient de prestigieuses formations orchestrales et de grandes voix lyriques à nos côtés : quels merveilleux cadeaux !

Désormais formé à la direction et aguerri à cette pratique dans le cadre de mon métier de professeur de musique en lycée à Agen, Pierre Gardeil et Geneviève Cockenpot m’encourageront à prendre les rênes du chœur de Saint-Jean, ce que je fis quatre années durant de 2003 à 2006 avec la Messe du Couronnement de Mozart, le Requiem de Mozart, le Magnificat de Bach, et Les Saisons de Haydn.

De retour en qualité d'organiste en 2008 pour accompagner la Petite Messe Solennelle de Rossini, en 2019 avec la Messe chorale de Gounod, ou bien en tant que chef de chœur pour diriger le Stabat Mater de Jenkins en 2021, et la Misa Criolla d’Ariel Ramirez en 2022, force est de constater que cet élan donné voilà 40 ans par Pierre Gardeil n’a cessé de cheminer.

 

Toutes ces expériences ont apporté un contrepoint ô combien éclairant à mon parcours de formation de musicien, de chef de chœur et de musicologue.

Pierre Gardeil a su sans conteste insuffler une impulsion déterminante qui m’a fortement sensibilisé à la beauté du répertoire sacré, et m’a naturellement conduit vers l’aventure de la direction de chœur que j’affectionne tant aujourd’hui, et qui constitue l’un des axes fondamentaux de mon métier d’enseignant.

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Dire Pierre Gardeil… - Michèle Olivier

 

Pour les petits Suisses des Alpes que nous sommes c’est la rencontre avec un Sommet érigé au beau milieu de la plaine gersoise !!

  • Un homme généreux qui nous a toujours accueillis en sa maison

  • Un érudit qui récitait volontiers de longues tirades

  • Un fin connaisseur des arcanes de la tauromachie

  • Un diplomate chevronné quand il fallut convaincre le chanoine Athanasiadès de jouer un orgue où il manquait des notes

  • Un souci constant de prodiguer à ses élèves un enseignement de qualité pour leur chemin de vie

  • Une plume alerte et incisive pour édifier les « Saisons de St-Jean »

  • Un bonheur de savoir Béatrice Uria Monzon entrée dans le chant et Doudou chez les cisterciennes

  • Un faiseur de surprise quand il t’emmène un jour à la Palombière avec Mifure

  • Une nostalgie quand il retrace son enfance dans son livre « Le levain du village »

  • Une sagesse épicurienne partagée entre saumon et foie gras dégustés à St-Philippe en bord de Garonne

  • Une voix tonitruante quand il s’agissait de donner ‘information à la chorale avant concert

  • Un vrai débateur autour de la table familiale avec Michel Serres, entre autres

  • Une patience, bien récompensée en retour, longtemps entretenue avec Roland Fornerod

  • Un mystique qui a sondé le mystère de Dieu dans son «Quinze regards sur le corps livré »

  • Un fervent supporter de l’équipe de rugby d’Agen depuis la tribune

  • L’aventurier qui n’hésite pas à toucher du doigt le Mt Blanc depuis l’Aiguille du Midi, atteignant les sommets neigeux revêtu de sa seule « blouse grise » légendaire

  • L’infatigable défenseur de l’Eglise, fustigeant volontiers au passage son cléricalisme

  • L’immense admiration et la délicatesse qu’il portait à son cher Marius Pasquier. Quelle joie partagée après un fameux Requiem de Mozart où se sont côtoyés Chorale de St-Jean, Orchestre et Ensemble Vocal de St-Maurice sous les caméras de la TV et le commentaire de Jean-Claude Bringuier

  • Sa fierté d’avoir construit une belle, grande et saine famille

  • Cet amour inconditionnel qu’il portait à Simone, qu’il aimait taquiner et tendrement enlacer….

 

Cette montagne, que nous avons mis presque 40 ans à gravir, nous ne l’avons pas redescendue.

Nous avons bâti un refuge à son sommet pour y abriter nos souvenirs et notre affection.

Merci Pierre

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